Madame Kavugho , Symbole de Résilience et d'Espoir à Beni

« Mshaidi imara », « témoin débout » est une série de newsletters écrite sur des personnes ordinaires qui participent au maintien de la vie à Beni, et sur qui personne n’a déjà écrit. Cette série met en lumière l’engagement et la résilience de quelques hommes et femmes de Beni qui luttent au quotidien pour que les massacres n’aient pas raison de tout un peuple. Cette série ne reprend cependant qu’une petite représentativité.

Maman Kavugho kathya Charlotte

Âgée d’une soixante d’années, Madame Kavugho Kathya Charlotte, avec son handicap, est présidente d’un groupe de parole AGIR RDC et concomitamment vice-présidente du site des PDIs dans lequel elle vit. Entourée de ses petits-enfants, fruits de son unique fille, elle incarne un leadership exceptionnel dans ce camp entièrement constitué de déplacés de guerre. Autour d’elle aussi des familles qui s’organisent pour survivre et qu’AGIR RDC a initié aux associations villageoises et des crédits (AVEC).

Ce matin du 4 aout, nous allons à sa rencontre pour apprendre de son histoire.

Madame Kavugho kathya Charlotte est une déplacée des massacres. Elle vient de Mutwanga, à 25 km de la ville de Beni, une de ces portes de Beni que les rebelles ouvrent régulièrement et y massacrent des populations depuis maintenant neuf ans. Depuis une année et demie, elle est arrivée dans ce site qu’une portion de la population occupe la majeure partie étant dans des familles d’accueil. Des conditions de vie sont difficiles ici et les déplacés vivent sous la menace d’expulsion proférée par l’église propriétaire de la concession dans laquelle le site est érigé. C’est dans ces conditions que Kavugho kathya Charlotte a pris ses responsabilités dans le camp. Elle aide les autres femmes, majoritairement abandonnés ou alors celles de troisième âge vivant avec leurs petits enfants orphelins de leurs parents, à tenir.

Elle réunit le groupe de parole qu’elle dirige chaque vendredi matin. À notre arrivée, nous échangeons sur le planning familial. Autour de ces femmes de troisième âge dont Kavugho kathya Charlotte, quelques jeunes dames. Et sa parole adressée aux jeunes dames présentes est impressionnante : « Ces enseignements sur la programmation des naissances nous arrivent trop tard. Mais nous sommes les mieux placées pour vous parler des conséquences fâcheuses liées à de naissances nombreuses. Nous avons des enfants que nous élevons maintenant difficilement suite à la situation de guerre. Notre santé s’est aussi détériorée au fur et à mesure que l’on mettait au monde. Je vous encourage aujourd’hui, vous qui êtes au début, à entrer en discussion avec vos maris. Que vos grossesses ne soient pas de surprise ». Maman Kavugho kathya Charlotte est très respectée ici, pendant sa prise de parole toutes hochent la tête pour montrer qu’elles sont d’accord. Elle est perçue comme leur protectrice, incarnant leur volonté.

Comme toutes celles qui l’entourent, Maman Kavugho kathya Charlotte a été, et est témoin des atrocités sans qualificatif qui impriment leur couleur à Beni depuis 2014. Mais elle reste debout et fait de la confiance qu’ont ses pairs en elle une force pour les organiser et les protéger. Elle fait partie de ce Beni qu’on ne raconte pas, mais qui porte allégeance à un futur beau, prometteur et réparateur.

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